vendredi 9 décembre 2005

Pérou 10

_ Puta madre, sácala rapido huevon !


Parlons un peu de football !

Le foot c'est ce qui rythme mes journées à Huanchaco, c'est ce qui rythme aussi la vie de ces vendeurs de bonbons qui longent la plage et le bord de mer incessamment à la recherche de l'invétéré du sucre ! Leur secret, leur fruit défendu, leur nectar à ces gens là, c'est leur rendez-vous nocturne. "19h stade du bord de mer" sonne comme un rendez-vous de duel, et ce ne sont pourtant pas des mousquetaires... juste des vendeurs de clopes et de bonbons rangés dans une boite à chaussures.

Depuis que je suis arrivé je participe chaque soir à ce match, à ce duel, à cette guerre qu'ils se livrent le temps d'une heure. Chaque soir, sauf ce soir... quelque chose me dérangeait, quelque chose sortait de ma perception étant dans la bataille... je me suis mis sur la touche en observation.
Les règles de ce football péruviens sont vagues et sans limite. Le but est de marquer, toujours, mais le reste entre dans des dimensions extensibles et poreuses. Première variante, le verbe est jeu ! Les
pieds dansent rapidement, la moitié d'entre eux ont grandi avec une balle entre les guiboles, et joue du quolibet en dribblant. Il n'y a pas d'arbitre, mais bien entendu le groupe à ses leaders, ceux qui jouent le mieux mènent la danse, ceux mènent le verbe détermine le tout. Je parle de verbe, mais que l'on comprenne bien que je parle d'argot péruvien de la rue du 21ème siècle... il n'y a pas de jolis vers et d'alexandrins en rime à la manière de nos poètes du 16ème. Je parle de l'espagnol de "la puta madre". Le combat se livre toujours dans une hauteur de ton. Celui qui parle fort peut tenir tête à celui qui parle "bien".

Le jeu est surtout un pari ! Pour jouer il faut mettre une pièce de 50 centimos dans la poche du garde touche, c'est la "quina". Les gagnants ramassent 1 sol chacun, autant vous dire tout de suite que ça pimente ! Les meneurs ne vont jamais chercher la balle partie sur la route ou vers la plage... car le temps est compté... l'équipe perdante ne prend donc pas le temps de réfléchir car rien n'arrêtera le chronomètre et court chercher la pelota.

La course est rapide, le stade petit, les joueurs aussi... on se laisserait presque à croire que l'on regarde un match de babyfoot, la balle va d'une cage à l'autre à une telle vitesse que les participants
s'époumone à vitesse grand V. Malgré cela, rien ne leur fera ôter le bonnet qui donne le style de celui-là ou le blouson qui pète de cet autre. La transpiration s'en mêle, et l'excitation. "Puta cruza cruza CRUZA !!!!". Les engueulades ne sont pas fausses, pas simulées, pas amoindries... il faut répondre ou s'écraser. Celui qui s'écrase perd le ballon qui passe à l'équipe grande gueule, au risque de se faire jeter par sa propre équipe, deux engueulades pour le prix d'une ! Les T-shirts sont tiraillés, poussés, empoignés et vissés. Les jambes se mélangent et se heurtent, pas un jeu sans quelques gouttes de sang ou un bel hématome. Et pourtant... Pourtant, tous ont le sourire et le rire en fond de gorge. Perdu dans cette sévérité du jeu, dans ce sérieux du pari, dans cette excitation du sang latin, le rire reste en fond sonore, et rare sont les fois où un échange verbal et postillonaire ne se termine pas par un rire et une tape amical dans le dos. Ces gens sont fiévreux, organiques, exagérateurs, emphatiques, joueurs, mais surtout ils sont amicaux ! Ils acceptent vite et ne reviennent pas sur un sourire. Leur football est leur catharsis, c'est la purge d'une journée à avoir vendu pour 10 soles de bonbons, de clopes et autres saloperies. Ils se retrouvent là pour se la "donner" vivement et sans obstacle. Le football est ici un sport, une loi, une envie, une passion, un rêve, un traité !

Je n'aimais pas le foot... je change.

Sportivement vôtre.

mardi 6 décembre 2005

Pérou 09

Jean Chalopin et Bernard Deyries nous montraient il y a 20 ans Les Mystérieuses Cités d'Or, Hugo Musella me disait il y a 3 mois "As-tu trouvé les citées d'or ? et si oui, où ?" et Nicolas Payan : "reviens le plus rarement possible...".

Bref tout cela pour dire que malgré la flemme majestueuse qui me mange ces temps-ci, je suis allé faire un tour du coté des temples del Sol y de la Luna de la civilisation Moche. Prononcer Moché ! Ils n’étaient tout de même pas tous horribles à cette époque là ! L'arrivée à Trujillo c'est faite sans encombre et, aimant les premières impressions je vous en fais part, j'ai trouvé au premier abord cette ville fort ressemblante à Coro du Venezuela... un peu plus grande mais aux façades identiques à l'ambiance similaire... Sur la Plaza de Armas la statue d'un certain héros semble danser le French Cancan vu de l'église mais non, il tient juste un flambeau de la taille de ses deux jambes réunies. Bref j'en reviens à mes Moches. Je me décide donc à aller jeter un coup d'œil à ce truc là qui de prime abord ne m'attirait pas trop. Le conducteur du minibus, une fois de plus, semble vouloir en terminer avec son job et le jeune hèle les passants afin de vérifier la capacité brute de la camionnette. Pour le coup je me retrouve avec le popotin de mamie me dévissant la tronche... heureusement qu'elle sent bon, et les pieds sous une tonne de patates. Grace à dieu ce n'est pas loin. Je distingue déjà une espèce de pyramide énorme ce perdant dans le brouillard matinal et reflétant la lumière poussiéreuse du soleil. Certainement la pyramide del Sol, le guide (routard) lui donne 340 mètres de haut... ce doit être impressionnant... même si d'ici elle ressemble déjà plus à une montagne qu'à une pyramide.

On me largue au milieu d'un petit désert de sable en me disant de marcher tout droit vers la montagne... soit... La montagne s'avère être... une montagne... et la pyramide... temple... truc... se trouve devant. Pyramide tronquée, il s'y passait donc des sacrifices humains ayant pour but d'apaiser les Dieux lorsque qu'une catastrophe naturelle se produisait. Il faut croire qu'il y en avait souvent vu le nombre de squelettes retrouves au pied de la montagne. La pyramide tronquée était tout d'abord ce que l'on pourrait appeler un autel. Pas plus d'un niveau pour se distinguer du peuple. Mais chaque dynastie décidant de changer quelque chose du passe, recouvre totalement l'autel pour en faire un plus grand... À la manière d'une poupée russe... Elle avait un joli nom mon guiiiideeee Atali... À la fin de la visite je me trouvais vachement plus intelligent qu'à mon arrivée, le souci c'est que depuis j'ai oublie pas mal de truc... Pilleurs de tombes, Chimus qui viennent mettre leurs morts au milieu des Moches, le temps et les intempéries qui estompes les couleurs des frises extérieurs... et le sable du désert qui recouvre une cite qui avait du abriter 600.000 habitants. Pour finir je ne me souviens plus des jours et je me crois un dimanche 3 quand nous sommes un lundi 5... drôle de chose que le temps... Je suis à présent dans cette petite baie de Huanchaco, faites de sable, de terre et de mer. Les falaises se déversent et la mer roule excitant ses pécheurs et ses surfeurs prenant un pied bien frisquet dans cette ambiance automnale. Les cavallitos de tortora chevauchent les vagues et ramènent le poisson de mon Ceviche (plat typique a base de poisson cru macéré dans le jus de citron). Ces embarcations faites de roseaux sont chevauchées de pécheurs essayant d'attraper plus de poissons que de surfeurs qui piquent la tête la première dans les vagues qui vont crescendo. Les pâtisseries se déplacent à vélo et klaxonne l'affamé. Les jeunes filles pédalent, ne vous en déplaise, et rayonnent qd d'autres hommes soufflent et râlent sur ces "bicyclettes panaderia". Les enfants ramassent leurs pêches et enfilent des roseaux dans les ouïes de leurs poissons. Les doigts en V quand je les photographie ils hurlent et sautent pour mieux voir leur image dans mon appareil. Huanchaco est douce, fraiche, mais vierge de tout distributeur MasterCard... Trujillo me voila donc revenir vers toi le temps d'un retrait...

Viva cerveza...

jeudi 1 décembre 2005

Pérou 08

J'entends encore résonner à mes oreilles ces mots de Victor Hugo monopolisant la "flânerie" pour la seule ville de Paris... mais Victor Hugo ne connaissait pas Cusco et c'était là tout son tord !

Je ne sais si Cusco veut dire flânerie en Quechua ou en Aymara mais en Emryssien cela va sans dire !

Cette ville est faite selon le principe de la beauté. Chacune de ses rues respirent une ambiance, une envie, une couleur et ses rues de pavés miroitants attirent la godasse à l'arpenter. La Plaza de Armas distille un parfum mélangé d'innombrables fleurs dont, malheureusement, je ne connais pas les noms ; et tout autour, des arcades en pierre protège le badaud des chutes de pluie toujours rapides et fraîches comme un matin de printemps. Cusco c'est une ville multinationale... la plus visitée d'Amérique du Sud. Des péruviens ? Oui, quand même ! Mais aussi des israéliens, des croates, des italiens, des canadiens, des états-uniens, des français, des espagnols, des japonais et j'en passe... Les langues se mélangent et donnent un espéranto nouvelle mode. L'arpenteur est gentiment sollicité, les restaurants jouent au concours de celui qui sera le moins cher, et les boîtes deviennent cinéma de début d'après midi pour faire salle pleine.

Ici on est l'amigo de tout le monde pour peu qu'on soit souriant, mais si en plus on baragouine quelques mots de castillan, alors on passe de suite au stade "hermano". Les cireurs de pompes cirent toujours, au nom du bénévolat rémunéré. Mais c'est la nuit que Cusco prend son masque de satin et vous attire dans les locaux sombres où la musique assourdit et fait bouger inconsciemment le corps qui vous accompagne. Les boîtes de nuit, les bars se disputent le client et l'on devient le bienvenu partout... entrée gratuite oblige... et l'on est bien loin de l'ambiance franco-française de la nuit. La bière à 5 soles coule à flot et l'happy hour s'étend au-delà de la nuit ! Ceux qui voudront pourront même s'essayer aux hallucinations du San Pedro (cactus hallucinogène), avec ou sans chamane, voir même aux rails blancs qui vous emmènent au bout de la nuit. Le fruit défendu du Pérou ne se défend pas tant que ça et heureux de se laisser attraper, il emmène loin le curieux.

Je vivais donc chez Oliver, l'homme de la forêt, celui qui tant nous a fait souffrir dans l'Amazonie profonde et qui tant aura été généreux de retour sur Cusco. Lui et sa femme Carolina mène une vie simple et seine. L'homme est dégingandé et facile à saouler... une fois fait il gesticule en pleine ville en courant après les touristes américains histoire de leur refiler une carte professionnelle... les effrayant plus qu'autre chose... Il attrape au vol les bottes de carottes qui passent et croque crue les fruits et légumes d'où qu'ils viennent. C'est le Tom Sawyer des temps modernes. L'écolier des buissons. Entre les jeux d'échec que je perds allègrement (tonton j'ai besoin d'entraînement), les heures étendues au soleil à lire mes Misérables, les discussions amicales avec les êtres vivants aux abords des places, les bières bues goulûment au fond d'un trou ou au grand soleil... le temps cusquenien passe et il sera bientôt 20 jours (déjà) que je suis basé dans cette ville charmante...
Il est temps donc de mettre les voiles pour aller voir ailleurs ce qui s'y passe...

Si je m'écoutais ? Je crois que je resterai ici un mois ou deux de plus ? Pourquoi ?

Flâner.