dimanche 30 octobre 2005

Uruguay

Je croyais dur comme fer vous avoir parlé du maté, mais il semble selon toute évidence qu'il n'en ait rien... Je m'en excuse, car le maté est la religion de l'Argentine.

Je m'explique... Les indiens fument le calumet de la paix, les français échangent un petit verre de rouge, les anglais une tasse de thé, les marocains du thé également mais eux, à la menthe exclusivement... Les argentins échangent leur maté. Pour les péruviens ou les boliviens, le maté symbolisent l'infusion de la feuille de coca ou de muñeta... mais pour les argentins c'est le contenant que l'on nomme ainsi. Faite dans du bois ou initialement dans une calebasse on y met de la yerba (prononcer cherba) amer ou douce selon le goût, ajouté à du sucre et l'on ajoute de l'eau chaude. Le tout s'aspire par une espèce de paille en métal filtrant directement la yerba dans le maté, que l'on appelle bombilla. L'aspect de l'ensemble fait penser à une de ses pipes de marins que l'on appelle brûle-gueule, avec son grand fourneau et son tuyau court. Comme le calumet de la paix déjà abordé, le maté se prête et tout le monde boit dans le même, jeune ou vieux, sans distinction, c'est là un signe de bienvenu, d'amitié. J'y ai eu le droit à différentes occasions, et c'est d'autant plus impressionnant que tout le monde en boit à toutes les heures de la journée, au bureau, au magasin...

Si je repense au sujet aujourd'hui c'est que justement j'ai quitté l'argentine hier et qu'avec Milena nous avons sur notre passeport le tampon d'entrée à la République Oriental del Uruguay. Ce pays si discret coincé entre les géants de l'Argentine et du Brésil, ce petit pays que les argentin nomme sournoisement une de leurs provinces, et qui été appelé autrefois la Suisse sud américaine. Ce petit pays se dispute la création du Tango... Montevideo et Buenos Aires réclament toutes deux l'invention. Et dans ce petit pays l'accent est similaire à l'Argentine. Alors qu'en est-il du maté ? Eh bien le maté y existe aussi ! Que dis-je, il n'existe que ça ! Les gens en boivent tellement que l'on se demande si il y en avait vraiment en Argentine finalement !!! Les gens dans la rue portent tous un thermos et leur calebasse à la main, en sirotant "de longue" leur nectar. J'ai beau essayer de les prendre en photo en flagrant délit de succion, chaque fois la timidité me monte aux joues (moi !!!) et je me retrouve dans l'impossibilité de faire une photo convenable, comme un OVNI qui nous fait trembler les mains, le rite du maté semble tirer parti du mystère... Je laisse de côté mes considérations assoiffées. Oui, nous voilà en Uruguay, pour peu de temps malheureusement puisque nous repartons demain. Un détour par là s'imposait depuis que j'avais entendu quelqu'un, à La Paz, comparer la ville de Montevideo à Cartagena en Colombie... Cette dernière a tellement enflammé mon cœur que je me devais de vérifier tout ça de mes yeux... mais... non... rien à voir. Montevideo de nuit me fait plus penser à Gotham City (Batman pour les incultes) qu'à autre chose, alors je me demande si mes oreilles ne m'avaient pas jouaient un tour et confondu Montevideo avec Colonia del Sacramento (si on le dit très vite c'est assez ressemblant). Car effectivement c'est déjà plus proche. Nous sommes arrivé hier à Colonia, après une traversée de trois heures passées dans le sommeil, nous amenant de Buenos Aires. Après avoir trouvé un bus en début de soirée pour rejoindre la capitale, nous avons loué un scooter pour faire "le tour du proprio". L'Uruguay est un pays de 4 millions d'habitants, disent fièrement les Uruguayos, alors qu'ils n'en possèdent que 3.5 selon les dernières statistiques. Autant dire que c'est moins peuplé que Nice l'été... Colonia abrite 29000 habitants et a été nommé patrimoine mondiale de l'humanité par l'Unesco depuis 1995 "Fondée par les Portugais en 1680 sur le Río de la Plata, la ville avait une fonction stratégique face à l'Empire espagnol. Disputée pendant un siècle, elle fut finalement perdue par ses fondateurs. Son paysage urbain préservé, mélange de solennité et d'intimité, est un exemple de la fusion réussie des styles portugais, espagnol et postcolonial." Les cheveux dans le vent (pas de casque ici) nous découvrant les plages de sable blanc, contrastant fortement avec les eaux boueuses du Rio de la Plata. Le vent froid nous interdit malheureusement de nous baigner (il faut croire qu'on tire des leçons du passé). Alors voilà où nous en sommes. Mes chaussures ont à présent des trous qui laissent passer de l'eau sous les semelles, le jean s'use, le T-shirt blanchit, nous sommes le soir d'Halloween et je ressemble à une goule ! En venant jusqu'au cybercafé je regardais de l'autre côté du trottoir une bande de gamins déguisés en sorcières, qui sonnaient aux interphones en riants, et de l'autre côté un papy, les larmes aux yeux, des larmes de rire de voir les enfants si joyeux. Joyeux Halloween à tous. Le capitalisme nous amène un tas de fêtes nouvelles, autant s'en servir à bon escient. La fête c'est fait pour s'AMUSER !


Spectacle : El hombre de la mancha est une comédie musicale que nous avons vue, Milena et moi, à Buenos Aires, avant de partir. La prestation était, à mon grand regret, assez médiocre si ce n'est celle de Raul Lavie qui interprétait Cervantès et Don Quijote, et celle du comédien jouant son fidèle Sancho. Mes yeux ce sont agrandis en entendant interpréter La Quête de Jacques Brel en espagnol, mais plutôt dans le bon sens, alors j'ai passé l'éponge... Seul avantage : j'ai à présent une petite idée de ce que peut être l'histoire de Don Quijote... et l'envie de m'y atteler plus sérieusement aussi !

En attendant de pouvoir vous en raconter plus...

PS : Pour ceux qui suivent le trajet de nos tribulations latines, qu'ils ne se posent pas la question... nous retournons à brides abattues vers le Pérou. Pourquoi ? Parce que ma chère et tendre a prit un billet de trois mois et que les trois mois arrivent à expiration et qu'un retour seul coûte les yeux de la tête ! Nous voilà donc obligé d'être de retour là bas pour le 13 novembre, jour de l'envol. Je vais une fois de plus me retrouver seul... mais ouiiiii elle reviendra, le temps pour elle de passer les fêtes et Hop la ! Le cul dans un avion pour rentrer !


PSS : Pour une liste exhaustive des patrimoines de l'humanité selon l'UNESCO, cliquer ici http://whc.unesco.org/pg.cfm?CID=31&l=FR

mercredi 26 octobre 2005

Argentine 08

Conducteur du bus n°64 : "¿Van al Caminito? Entonces, deben bajar acá." (Vous allez au Caminito ? Alors vous devez descendre ici.)

L'air distille un vieux tango, et l'eau croupie du petit port, une odeur âcre. Nous sommes à La Boca, ce quartier si connu pour ses façades hautes en couleurs et son tango. De l'arrêt de bus, on devine de loin les petites ruelles et les rouge, vert, jaune, bleu des maisons... tantôt de ciment, tantôt de taule ondulée. Des danseurs de tango prêts a poser, des aquarelles de façades suspendues aux façades, de l'artisanat d'usine, nous revoilà dans le monde impitoyable du tourisme qui grignote jusqu'aux choses les plus authentiques... même les plus pauvres. Les couleurs des murs sont passées et tirent sur le pastel ; on constate le temps qui s'en va grâce aux cartes postales. Dans notre chemin nous finirons par avoir faim. Malheur à qui veut manger dans un lieu touristique... on y mange du pigeon ! Les rabatteurs s'arrachent les propriétaires de billets verts... mais n'en possédant pas, on nous mettra de cotés... les halls a tango sont fait pour le clinquant ! Alors on marche et on repasse devant ses aquarelles que je regarde ce coup-ci connaissant déjà les murs. Mon œil est tiré par une jolie série de danseurs de tango l'encre de chine, et il faut croire que c'est une bonne fortune car c'est la que nous allons rencontrer Pedro, ce petit vieillard, auteur des dessins. Le hasard veut que je plaise a cet homme dont le physique m'inspire une douce contemplation. Sa barbe couronne son visage d'une douceur angélique, alors que ses yeux, grossis par les loupes de ses lunettes en écailles, me dévisage. Je lui ai dit que je jouais du théâtre et depuis cet instant j'ai l'impression que c'est moi qui inspire cet homme. Dans sa litanie, il me demande deux choses_ de lui faire une critique artistique concernant sa peinture ; et, de lui faire un dossier de presse concernant mes activités de comédien... Je ne comprends pas bien le sens de sa demande, mais le tout m'amuse. Pedro y met le ton et les gestes et j'assiste à mon petit spectacle particulier. Ce bonhomme boulo et tyrannisé par un cancer a joué dans une kyrielles de films argentins et n'a jamais obtenue de premier rôle, il a également écrit pour la presse et la TV. Mais moi dans tout ça, ce qui m'a le plus surpris, c'est qu'il m'ait fait la bise pour me dire au revoir, et me remercier d'avance... il me semble qu'en France nous manquons cruellement de cette chaleur humaine gratuite et j'en suis peiné parfois... En quittant Pedro, le ventre nous torturant toujours nous nous remettons à la recherche d'une restauration possible. Une des rabatteuses nous ayant harangué plus tôt nous interpellera dans la rue pour nous faire découvrir discrètement un restaurant bien moins cher que ceux de façade, ou vont manger les locaux... Alors pour quelques piécettes la Milanaise enfilée nous repartons le ventre fier vers le centre où je m'apercevrais que j'ai perdu les coordonnées de Pedro...


Une raison de plus pour retourner à La Boca n'est-ce pas ?

lundi 24 octobre 2005

Argentine 07

On reprend la prose imposée et on donne des news !

¿Que tal ?

Buenos Aires, est une ville... impressionnante, copiée, nocturne, à double facette, polluée, verte et grise. Les couloirs de Subte (métro) paraissent miniatures quand on les compare à ceux de notre capitale, et quand je parle de copier, n’y voyez pas de dépréciation de ma part, j’utilise juste le mot que tous les Porteños utilisent en parlant de leur ville.

“¿De dónde vienes tu? ¡Francia! Ahhh como te parece Buenos Aires... Muy lindo eh? Pero no como Paris... ¡Acá solo es una copia!”

L’obélisque tranchant l’avenue 9 de Julio rappelle vaguement quelque chose et cette même avenue glace le sang tant on a d’essayer de la traverser en une seule fois sans y parvenir. Come with your shooes for dancin tango, amiga! Le tango c’est l’âme même de Buenos Aires... et les endroits prolifèrent ou l’on peut voir un couple joue contre joue déambuler en rythme et en paso sur une musique à faire pâlir les crooners de la grande époque ! Alors évidemment un cours s’impose... que dis-je un ! Deux ! Trois ! Quinze... bref tant qu’il y aura de l’argent, il y aura le tango car son venin m’a pris et je ne me sens plus libre de mes mouvements. Dans ce magasin, se profile au fond un atelier où les chaussures sont faites mains, et à côté un parquet carré ou deux professeurs dansent, attendant l’élève probable. Alors on essaye tour à tour qqs chaussures avant de se lancer timides sous les ordres souples du couple dominant. Les bras en cercle, seul avec du vide on réapprend a marcher et je repense à ma première année d’Arts du Spectacle ou mon adorable professeur Stephan Ramirez (pub gratuite ;) lui aussi nous réapprenait à nous occuper de notre corps comme de l’espace. Alors je marche le torse donnant la puissance au corps et à l’idée, vers l’avant. C’est lui qui donnera les instructions à la danseuse, comme un émetteur récepteur le couple doit apprendre à se comprendre et à s’entendre, autant vous dire que c’est dur en ce qui nous concerne car les quiproquos entre Milena et moi sont présent dans 70% de nos conversation (un bonheur) alors qui sait le tango va peut être nous aider. Et puis c’est le tour d’apprendre nos premiers pas (paso), en avant, en arrière, sur les côtés, croisés... on perd plusieurs fois l’équilibre et éclatons de rire... bien que selon ma douce je sois drôlement sérieux... encore la faute dudit prof de théâtre ! Mais j’en voulais venir à parler de cette rue...

Avenida Corrientes.

D’abord, en sortant du Subte, j’ai cru rêver... et puis en marchant le long des quelques kilomètres de cette avenue, j’ai vu que c’était vrai. Imaginez le quartier latin fusionné avec Broadway... Voila la mince idée de ce que peut-être cette avenue. Tous les dix mètres se profile un théâtre, un café théâtre, une scène, bref tout ce qui peut donner lieu à un spectacle, danse, théâtre, chant, concert, orchestre, à une lecture, à une représentation de toutes les formes imaginables... et puis d’un autre côté, des librairies à profusions... du vieux, du neuf, du parallèle, de l’ésotérique, il y en a pour tous les goûts, pour toutes les bourses, pour toutes les idées et toutes les langues. Corrientes c’est un peu le genre de rue que je rêvais plus jeune et dessinais plus vieux...

Ensuite il y a Tigre, cette petite ville mangée par les Barrios de Buenos Aires, resplendit de verdure et de sa rivière du même nom. Le soleil y chauffe bien et nous permet de faire une balade des plus plaisante en ce dimanche de grisaille dans le centre.

Je vous embrasse, nous resterons ici tant que nous ne passerons pas 30 pasos sans tomber... autant dire qu’on y est pour un moment !