_ Ce serait formidable, pourquoi pas, oui !
Voilà comment se sont décidées nos courtes vacances d'août lors du cours de français que je donne hebdomadairement à Toshi. Nous en avons reparlé deux ou trois fois, afin de décider des dates, et le tout fut rapidement décidé. Miléna était trop heureuse de pouvoir fuir les journées chaudes de Tokyo et j'avoue que l'idée me réjouissait tout autant.
Je connaissais déjà Yamagata de mon voyage précédent au Japon, un voyage pendant lequel j'avais rencontré Osamu, un japonais qui m'avait pris sous son aile quelques jours, le temps de me faire connaitre sa région et de m'emmener 500 kilomètres plus au nord. Mais cette fois-ci nous vivrons donc chez Ai-chan, Chikashi-kun et Aya-chan leur petite fille.
Nous prenons le train à Ebisu au petit matin et manquons de le rater à quelques secondes près. Nous aurons 6 changements à effectuer pour 6h de trajet environ. Il y a évidemment des moyens bien plus rapide de se rendre à Yamagata, mais quel plaisir existe-t-il à aller trop vite et à ne pas ouvrir les yeux. Il est vrai que les yeux n'ont pas dû être ouvert toute la durée du voyage néanmoins car se lever à 6h du matin pour chopper le train n'est pas notre grand fort... du coup nous avons récupéré un peu en piquant de petits roupillons par-ci par-là ! À notre arrivée, Ai-chan (la maman) et Aya-chan (la petite fille) nous attendent à la gare et nous reçoivent à grandes doses de sourires. Nous sommes bien content d'être arrivé, qui plus est la chaleur infernale et humide de Tokyo à laissé place à un temps nettement plus sec et doux. À Yamagata, je ne reconnais pas les rues (il faut dire que la dernière fois que j'ai vu la ville j'étais drôlement ébréché). Ai-chan nous ramène tout de suite chez elle, une grande maison à deux étages en forme de fer à cheval. Cette forme est un peu spéciale mais permet néanmoins de laisser la lumière filtrer directement dans chaque pièce de la maison, ce qui est un rare plaisir dans les maisons japonaises.
Ai-chan travaille au restaurant de ses parents et doit bientôt s'y rendre (environ 16h). Nous profitons donc avec Miléna pour faire un tour en ville, sachant que nous avons rendez-vous à 20h pour manger au restaurant, avec toute la famille. À 20h, nous voici donc de retour, reçu par une japonaise en kimono dans l'entrée d'un restaurant qui fait plus penser à un
ryokan qu'à autre chose. Le restaurant est divisé en 5 grandes salles réparties sur 3 étages. Nous sommes installés dans la plus grandes d'entre elles et rapidement présentés. Mais ni Ai-chan ni Chikashi-kun ne sont là et rapidement le papa et le frère se mettent à manger sans attendre les femmes. Ne sachant pas vraiment comment faire, nous attendons un peu et prenons bientôt deux plats de retards, avant de nous décider à nous y mettre nous aussi. Deux femmes en kimono viennent régulièrement rajouter des plats sur la table, nous donnant le tournis avec une quantité de nourriture bien trop importante. Des légumes japonais, du tofu, des eda-mame, des huitres au citron, des huitres cuites à l'ail, du poisson, des bouillons, des onigiri, et bien sûr de la bière, du saké chaud et du vin de la région. Nous entamons divers sujets de discussions et pouvons enfin apprécier notre année d'étude dans toute son ampleur. Bien-sûr il nous manque énormément de vocabulaire, mais quand nous ne comprenons pas un mot en particulier il est alors simple de se l'expliquer avec d'autres mots, alors nous retombons rapidement sur nos pieds et pouvons continuer le fil de la discussion.
Kujira. Le mot reviendra plusieurs fois dans une discussion alors que nous buvions notre soupe avec des lamelles de poissons. Nous ne comprenions pas le mot, mais vu qu'il était isolé nous n'y prêtions pas trop attention, mais les 4 japonais qui nous entouraient nous regardant fixement puis répétant deux ou trois fois
kujira, nous comprîmes enfin qu'il fallait que l'on comprenne ce mot.
Ichi-ban ookii sakana... Nous avons rapidement compris que nous mangions de la baleine depuis bientôt 5 minutes...
Aux défendeurs des droits de ce gros mammifère marin : je n'avais jamais mangé de baleine et nous ne savions nullement ce que nous mangions. Néanmoins en l'apprenant, nous n'avons pu faire autrement que de finir notre bol. Je peux dire aujourd'hui que la baleine n'est pas le meilleur poisson que j'ai mangé, loin de là, elle n'est d'ailleurs pas très populaire au Japon (nous n'en n'avons quasiment jamais vu au restaurant), et n'a pratiquement aucun goût.
Chez Ai-chan, la chambre d'ami est une chambre traditionnelle japonaise, placé conjointement au salon. Des portes en papier lui permet de s'isoler. Le sol est en tatami et pour le bonheur de notre dos nous dormirons sur des
futon.
Le lendemain, la petite famille, après un petit déjeuner consistant, nous emmène visiter les alentours de Yamagata. Nous irons prendre un thé vert traditionnel dans une reconstitution de village digne d'
un fond d'écran windows et passerons un peu de temps dans les échoppes à souvenirs. À midi pile, nous irons ensemble, manger des
soba froides (pâtes au sarrasin). Le bol
futsu (normal) est commandé pour Miléna, alors que j'ai le droit au
oomori (grand). Ce qui nous arrive par contre, est un grand bol pour Miléna et une marmite pour moi... sachant que nous avions déjeuner à 9h30, et pris le thé (avec pâtisserie) à 10h30... je vous explique pas notre tête quand nous avons vu ce qui arrivait à table... néanmoins, pour compenser... les soba froides, que nous n'avions jamais essayé, étaient excellentes.
Nous nous rendons au supermarché pour les provisions du soir. Du monde vient pour le barbecue organisé sur le toit de la maison. Miléna propose de faire des spaghetti bolo, et nous trouvons également quelques bières belges histoires de faire goûter à nos hôtes de nouvelles saveur (Chimey bleu, Pêcheresse, Kriek cherry, Leffe...). Le repas promet d'être gargantuesque car nous avons de la viande, plusieurs dizaines de gambas, presque 4 kilos de bolo, des saucisses... bref on avait le temps avant de mourir de faim... sans parler du vin de Yamagata, des bières belges et japonaises et du saké. Le repas commence à 17h... le soleil est toujours présent dans le ciel et nous avons (en ce qui concerne Miléna et moi) encore le goût des soba du midi dans la bouche.
La soirée devient rapidement très arrosé et c'est là que nous devenons de purs bilingues en japonais. Chikashi-kun ne laisse pas sa part au chien et se met à danser un ballet mémorable. Le pétillant vole en éclat et arrose les demoiselles aux alentours et chacun fait son tour de chant.
La soirée prend fin tôt (comme elle avait commencé). Avantage : nous pourrons profiter de notre journée du lendemain. 8h nous nous levons et réfléchissons à ce que nous voudrions faire, un rapide tour sur internet nous décide à aller visiter les îles de
Matsushima au nord de
Sendaï.
Nous voici donc à nouveau dans le train, mais cette fois-ci en direction de l'est, vers la côte pacifique. Le soleil est au rendez-vous et Miléna a la patate depuis que nous avons quitté Tokyo. C'est donc dans la joie que nous visitons une multitude de petites îles dans le transport le plus touristique au monde... le bateau à touriste japonais. J'imagine qu'il y a beaucoup de styles de touriste et que chacun vit la sienne comme il le sent... mais les japonais, en tant que touristes... c'est vraiment des phénomènes. Capable de se serrer comme des harengs saures dans un bateau pour au final dormir et ne rien profiter du peu qu'il y a à voir.
Ceci dit nous y sommes aussi dans le bateau... mais sincèrement si on avait vu la tronche du truc avant d'acheter les tickets on se serait peut-être contenté de visiter les îles les plus proches à pied. Première chose que nous faisons donc en revenant sur terre est de traverser le grand pont rouge qui relie l'île la plus proche pour se balader.
Le lendemain, c'est une chose tout à fait extraordinaire qui nous arrive, et peut-être que là je peux être plus précis en disant : "qui m'arrive".
Je parlais au début de ce courrier d'Osamu et de sa copine Jun qui m'avait accueillit de manière incroyable il y a 4 ans. Osamu avec qui j'ai gardé un entretiens épistolier (fort peu éloquant puisque je ne parlais pas japonais et lui pas anglais [et encore moins français]) se résumant à "I'm happy, Japan is hot, How are you!". Bref il y a 2 ans, plus aucune nouvelle et les 4 adresses que j'avais de lui répondaient aux abonnés absents. Au matin de partir pour Yamagata, j'avais par acquis de conscience, réessayé de lui envoyer un email, mais encore une fois... daemon mailer ! Sur le chemin pour Yamagata, je reçois un email sur mon téléphone : c'est Osamu qui a reçut l'un de mes e-mail sur la boite de sa copine.Aujourd'hui, c'est donc avec Osamu et Jun que nous passerons la journée. Les retrouvailles sont incroyables et d'autant plus incroyable que pour la première fois, nous communiquons ! J'apprends son nom de famille, son âge, son métier, j'apprends aussi que depuis deux ans Jun et Osamu se sont mariés, qu'il a lancé sa propre société de construction en avril 2007...
Il est étonnant de s'apercevoir à quel point cet homme, de qui je ne connaissais rien, comptais pour moi, et après la journée que nous avons passé ensemble je crois que je peux dire sans prétention, que je comptais pour lui. Pourtant tout ce que je savais de lui était les gestes qu'il avait eu à mon égard, les attentions et les sourires, les instants partagés...
Malgré ça, il est quand même bien agréable de pouvoir se raconter des histoires et nous prenons donc tous les quatre la route vers Zao-san, la montagne qu'il m'avait fait visiter lors de notre première rencontre.
Nous prendrons ensuite la route vers le Onsen et le château de Kaminoyamaonsen (et son bain de pied frôlant les 60 degré [douloureux]). Puis nous irons manger du crabe, du sashimi de Tai (dorade), des sushi dans le restaurant où, encore une fois, nous étions déjà aller manger ensemble.
On finira honorablement une journée identique (et extraordinaire) à celle que nous avions déjà vécu ensemble, mais pourtant tout aussi riche en ressenti.
Le lendemain nous quitterons Yamagata, son air frais et nos nouveaux amis pour retourner vers la plus grande métropole du monde, ou nous reprenons le jour même le travail (dur !).
Photos de Yamagata :