Japon 35
Et voilà un nouveau départ...
Nous arrivons de Kyoto à 6h30 du matin, gare de Shinjuku. Le temps à peine de rentrer à la maison prendre une bonne douche réparatrice et nous voilà reparti sur le chemin de l'école car aujourd'hui (9 janvier) c'est la rentrée ! Les cours sont dévastateurs... les vacances ont été bien vide de révision, mais aussi le niveau n'est plus vraiment le même, la prof. fonce et n'attend plus personne, chacun sa merde comme on dit ! De retour à la maison à 13h30 nous avons tout juste de quoi prendre un repas avant de repartir donner nos cours. Autant dire que le retour à la réalité n'a pas été de tout repos. Mais ce n'était qu'un sursis. Lundi 14 janvier est un jour férié au japon (Seijin no Hi) nous avons donc en perspective un week end de trois jours.
Jade, la femme pour qui Milena travaille, nous a proposé de l'accompagner, elle et ses deux enfants, Bianca et Alexander, à Minakami, une station hivernale posté dans la préfecture de Gunma. Je serai en charge de la conduite ce qui m'excite particulièrement sachant qu'ils possèdent un Land Cruiser et que nous allons en montagne sous la neige. Bref, vendredi 16h nous voilà en voiture prêt à attaquer la route sur des fauteuils chauffants doublés cuir et la voix synthétique de la japonaise GPS nous chantant des gauches droites dans les oreilles.
Amy, et Chad sont fils, nous accompagne, ainsi que Marcel.
Amy est d'origine Irako/Syrienne, Marcel est quant à lui Suisse-Allemand, Jade est Sud-Africaine. En faisant le compte, dans la voiture, nous parlons, français, allemand, anglais, japonais, arabe, espagnol, afrikaans... autant dire que notre langue de communication sera l'anglais pour le week end... encore que des mots d'un peu toutes les langues sortent aussi après une ou deux bouteilles de vin.
Nous aurons tôt fait de nous perdre, malgré les instructions du GPS. Sorti trop tôt de l'autoroute nous nous perdons sur les petites routes. Une fois encore la gentillesse d'un camionneur nous aura remis sur la bonne voie. Une petite pensée pour cette homme qui a quitté son camion en plein milieu de la route pour nous indiquer le bon chemin !
Nous arriverons finalement au chalet 5h après notre départ (au lieu de ~3h). La neige n'est pas vraiment au rendez-vous. Mais la magnificence du chalet nous rassure et nous sommes sûr de passer un merveilleux week-end. Les trois enfants ne décrochent plus de leur Nintendo DS, moi ça me va j'ai aussi emporté la mienne et nous faisons ensemble des concours de Mario Bros ! (merci à Chad pour ses quelques astuces).
Le chalet se perd sur trois étages. En arrivant nous tombons sur une pièce immense. C'est le salon/salle à manger. Tout y est de bois. Une baie vitrée ouvre l'angle de la salle sur une forêt de sapin à perte de vue. Derrière la cheminée en pierre, discret mais présent, l'ensemble plasma sono promet des soirées sympathiques et le tapis chauffant rassure nos pieds à moitié congelés ! Ce n'est pas le moment de se laisser mourir et nous attaquons donc le repas avec en vedette principale... Jade, reine de la soupe !
Le lendemain, à la surprise de tous, le paysage est blanc. Il neige d'ailleurs toujours. Le sol est recouvert de 30 cm de poudreuse. Si cela continue ainsi nous pourrons demain nous faire plaisir sur les pistes. La journée se passe dehors à essayer de fabriquer un igloo (je parle pour moi) car le grand plaisir des enfants est de se jeter dessus dès qu'un mur commence à ressembler à quelque chose. Ce qui aura pour fin de me décourager après deux heures de tentatives infructueuses.
C'est à présent qu'arrive le point d'orgue de notre séjour. Événement non-attendu pourtant. Les enfants prennent leur bain.
Excusez-moi car je ne vous ai pas présenté le reste de la maison : RDC : Salon/salle à manger, bar, cuisine, remise, salle de dépôt des ski snowboard..., et deux chambres (dont celle de Miléna et moi). Au premier : 4 chambres sous appentis, à la manière des refuges de hautes montagnes, un toilette. Au sous-sol : 2 toilettes et la salle de bain/onsen.
Les enfants baignent donc dans le Onsen... sous ma surveillance, puis celle de Miléna... puis, ben, celle de personne à priori, puisque Chad voulant s'assoir ou ayant été poussé... effleure le poêle à pétrole et se brûle au second degré les deux cuisses... pas de photo du désastre pour vous... je vous épargne ça. Le gamin se met naturellement à hurler. Après une seconde de remise au point j'attrape le gamin avec Marcel et lui plonge les fesses dans un bain glacé. Chad se calme sous l'effet anesthésiant de l'eau glacé. La maman reprend ses esprits. La peau brûlée donnait au tout un aspect lugubre, mais dès que la plaie sera nettoyé tout ça sera nettement plus joli à regarder. Heureusement, nous avons la crème nécessaire pour les brûlures et des gazes pour le bandage. Amy perd ses moyens face à son fils. Miléna et moi nous dévouons donc pour enlever les peaux et lui appliquer la crème. Lorsque les bandages sont posés tout va déjà beaucoup mieux et les esprits sont au repos. Chad n'a presque plus mal. Confirmation deux heures après quand je le retrouve en train de sauter sur les lits avec Alex et Bianca. La plaie est tout de même importante et il faudra rapidement amener l'enfant à l'hôpital. Mais la crème que nous avions est relativement miraculeuse et la plaie prend de belle forme. Ce n'est pas exactement ce que nous attendions de ce week end...
Chad allant mieux, nous passons en bonne soirée, où en l'occurrence par manque d'exercice dans l'enceinte de Tokyo je me prends à vouloir grimper sur les poutres et le haut plafond de la maison.
Le lendemain la neige tombe toujours. Il est temps de faire chauffer la planche. Seul Marcel et moi éprouvons le besoin d'aller tâter la neige. Nous démarrons donc le 4x4. Le tout patine. Arrivé au pied des pistes, les forfaits achetés, nous enquillons pour la première descente.
Bleu est peut-être un surclassement de cette piste à moitié plate. Nous décidons d'aller plus loin, mais rien n'y fera. Malgré toutes nos tentatives... nous ne trouvons rien d'intéressant sur les 3km de piste de la station. La piste la plus longue nous coute 15 secondes de descentes... le plaisir de la glisse n'étant pas au rendez-vous, nous essayons de trouver quelques spots pour faire quelques sauts, mais la encore... c'est plat. Nous repartons donc un peu déçu après moins de deux heures de descente (si on peu appeler cela de la descente).
Et dans tout ça, le Japon, que devient-il ? Eh bien le Japon nous rappelle bientôt à lui puisque nous allons faire l'expérience le soir même d'un Onsen réputé : Takaragawa Onsen.
Des flocons légers tombent alors que nous descendons ce sentier vers les bains d’eau chaude naturelle (onsen). Il reste bien peu de onsen mixte au Japon, suite à l’ère Edo et à la seconde guerre mondiale, mais certaines institutions centenaires ont maintenu leur pratique. Les onsen de ce type sont bien rare au Japon et peuvent se compter sur les doigts d’une main. Le chemin glisse et je prends garde à ne pas enfoncer mes chaussures trop profondément dans la poudreuse naissante. Nous entrons alors dans un tunnel, une protection contre la neige sur le chemin. Cela aurait un tunnel sans histoire s’il n’avait pas été aussi fourni que les soubassements du château de Moulinsart (cf. Le trésor de Rackham le Rouge). Des millions de trésors y sont entassés et je pourrais y passer des semaines entières à rêvasser si seulement la compagnie derrière ne me poussait pas plus avant dans la hâte d’aller plonger son corps nu dans les eaux bouillantes aux milieux des tourmentes de neige. Des buddhas riants à gorge déployée nous regardent passer, des tambours japonais sonnent sur notre passage, des bibelots embobinés dans des toiles d’araignées millénaires et des masques grimaçants attendent. La descente n’est pas longue mais le chemin tourne et nous offre une nouvelle surprise. Quatre jeunes ours bruns (en cage) tournent et retournent dans leur repaire en nous voyant arriver. Nous nous regardons un instant dans le blanc des yeux avant de prendre le dernier virage vers le bain. La première image que j’en ai me rappel instantanément les publicités rabâchées dans les stations de métro tout autour de Tokyo. Représentez-vous une montagne touffue, enneigée, au milieu de laquelle un bain, encerclé de hautes pierres, fume. Plantez au milieu du tout une vieille pagode et une imposante statue représentant Buddha et vous aurez une idée du tableau. Nous allons nous déshabiller dans les vestiaires froids et rudimentaire qui se trouve d’un côté du bain. Tout est fait de bois et porte une odeur relaxante. C’est nu comme un vers que je me dirige sous la neige vers le bain aux fumerolles colorées et à l’attirance improbable. Mes pieds avançant dans l’eau grincent du changement de température mais mon corps ne tardant pas à les rejoindre m’annonce plutôt le contraire me faisant fermer les yeux dans une concentration vers le plaisir. Lorsque je rouvre les yeux, il est vrai que je vois des femmes autour de moi. Toutes enveloppées dans des serviettes qu’elles emmènent avec elles dans l’eau (l’impudeur a une limite). Certains japonais ont emmené avec eux des cannettes de bière qu’ils posent sur les rebords de pierre. Je regrette de ne pas avoir emmené avec moi une telle boisson qui m’aurait permis de rafraîchir mon intérieur quand mon extérieur se faisait dorloter par les mouvements brûlant de l’eau. Je renverse ma tête dans l’eau et reste ainsi un moment à rêver les yeux perdu dans un ciel noir, la bouche ouverte, espérant récolter quelques uns des flocons de neige tombant sur nous. La sensation de se retrouver dans un tel endroit est mystique. Je n’aurais pas été étonné de rencontrer, prenant son bain, quelques rônins ou chevaliers prenant quelques repos à la suite de leurs longues errances. Le sentiment laissé par cet endroit est fort et réelle.
La suite s'appelle retour. Nous aurons droit à nouveau à de nombreuse heures de route, mais sans se perdre cette fois-ci. Tokyo est plus facilement trouvable qu'un village en pleine montagne.~retour à aujourd'hui~
Il est 1h50. Demain, cours à 9h10. Il est pour moi temps de laisser la plume.